Le judaïsme préside à la naissance d’à la recherche du temps perdu. à peine le récit de combray débute-t-il que l’origine juive de swann est mentionnée, au détour d’une phrase comme s’il s’agissait d’un détail anodin. s’il l’était, il ne serait pas indiqué dès l’ouverture du roman, succédant au catholicisme de combray, avec son église, ses légendes et ses aubépines qui cristallisent l’environnement religieux. tout juste postérieur à la religion chrétienne, dans la chronologie romanesque, le judaïsme se trouve lié à swann et au drame provoqué par ses visites nocturnes. la séquence du baiser obtenu ou du tabou transgressé, fondatrice de l’oeuvre et du destin du narrateur, a pour héros principal une figure qui se recommande par sa judaïté. il est vrai que le rapport de swann à celle-ci est des plus lâche. ses relations familiales semblent inexistantes et c’est du côté du faubourg saint-germain que son coeur regarde. de sa personne physique même ne transparaît aucun caractère susceptible de révéler son origine, tant qu’il est jeune du moins et avant que les ravages de la maladie ne lui impriment un visage de prophète biblique. cet homme, qui est à peine juif, est propulsé au premier rang dès les premières pages du récit, accompagné de sa vaste culture historique, de ses recettes culinaires, et de son judaïsme que personne n’évoque mais que personne n’ignore. la présence dans le petit et catholique combray d’un juif ne laisse pas de surprendre quelque peu. les guermantes, qui en sont les châtelains, n’honorent presque jamais de leurs visites le bourg que swann fréquente avec assiduité. il ne dépareille pas l’homogénéité des lieux où il se fond corps et biens.